Discours de clôture du 9ème congrès national de la FSU
C’est à moi qu’il revient de clore ce 9° congrès national de la FSU. Je mesure tout ce que cela représente en termes de responsabilités dans le contexte actuel, c’est à la fois très impressionnant et très motivant, et c’est en tous cas avec une grande détermination que j’aborde ce mandat.
Je démarre ce mandat dans le contexte si particulier que nous connaissons, c’est un contexte porteur car en pleine dynamique de mobilisation, mais il est aussi complexe et lourd d’enjeux face à un gouvernement qui ne lâche rien, en pleine mobilisation d’ampleur des personnels qui, à notre appel, ont repris confiance dans l’action collective et pour lesquels il faut donc être à la hauteur des attentes, ces attentes étant que nous définissions des stratégies syndicales efficaces pour gagner. On peut dire que je débute ce mandat dans un moment crucial pour la FSU et pour le syndicalisme, je peux vous dire en tous cas que j’en prends toute la mesure, je vais revenir ensuite sur la mobilisation en cours.
Avant cela, je souhaite dire que je suis très heureux de devenir secrétaire général ici, à Clermont Ferrand, puisque d’une certaine manière c’est dans la grande région AURA que j’ai commencé à prendre des responsabilités, même si précisément c’est plutôt à Lyon que j’ai commencé comme secrétaire académique du SNES-FSU avant de m’occuper du secteur situation des personnels au secrétariat national de la FSU. Heureux de devenir secrétaire général à Clermont Ferrand aussi car c’est la terre des combats qui ont été rappelés par Claude dans l’intervention d’accueil, ville marquante dans l’histoire de la FSU, Claude l’a aussi rappelé, et ville où nous avons été accueillis par une équipe de militants qui a tout donné pour la réussite de notre congrès, que ce soit l’équipe locale ou l’équipe nationale, ce n’ était pas simple en pleine mobilisation, avec par exemple la nécessité d’assurer participation à la manifestation et bon déroulement du congrès, arrivées retardées et départs précipités, qu’ils et elles soient remerciés chaleureusement, de même que l’équipe nationale d’organisation du congrès qui a été comme d’habitude au rendez-vous de ce grand moment pour nous, merci à elles et eux.
Je sais que de manière générale, pour la responsabilité qui m’attend, je peux compter sur des militantes et des militants qui s’engagent parfois sans compter, c’est ce qui fait la force de la FSU.
Un mot, justement, de notre fonctionnement interne. Ce congrès dans le thème 4 a donné des éléments pour progresser dans le travail fédéral qui doit être le nôtre à tous les niveaux, j’espère que nous pourrons avancer sur un renforcement de la dimension fédérale de notre activité syndicale, nous en sommes tous conscients, nous nous le disons tous et toutes dans nos conversations quand nous en discutons, à charge maintenant pour nous d’avancer concrètement et de parvenir à penser fédéral dans toutes nos activités syndicales, ce n’est pas un supplément d’âme qu’il s’agirait de se donner quand on y pense ou quand on en a le temps, penser fédéral, cela permet précisément de donner une dimension plus grande à notre activité dans nos syndicats, se mettre dans cette perspective enrichit donc la fédération tout comme elle enrichit ses syndicats nationaux, j’en suis convaincu et les pistes d’amélioration devront faire partie des réflexions internes majeures tout au long du prochain mandat.
Toujours sur notre fonctionnement interne, je suis très content de prendre mes fonctions à la suite d’un vote majeur sur la parité avec l’objectif d’égalité entre les femmes et les hommes inscrit désormais dans les statuts de notre organisation, c’est un outil essentiel si on veut mettre en accord nos pratiques militantes avec notre conception de l’égalité entre les femmes et les hommes, et c’est important pour moi car je ne voudrais pas que, succédant à Bernadette qui aura marqué de son empreinte la fédération en portant sans relâche l’engagement féministe, en s’imposant en tant que femme dans un monde syndical encore très masculin, on puisse imaginer un quelconque relâchement sur cet objectif. C’est bien pour cela que je m’engage à tout faire pour que l’égalité progresse dans notre organisation tout comme je m’engage à continuer à porter les combats féministes dans l’ensemble des champs où nous intervenons, nous avons encore du chemin à parcourir sur ce plan, en interne comme dans la société.
Pour tous les combats que nous avons à mener, nous avons besoin d’un syndicalisme fort et efficace. Nous le savons, il est parfois de bon ton de renvoyer les syndicats en général dans le camp de l’ancien monde alors que le nouveau monde fonctionnerait de manière plus « agile ». Il est de bon ton de caricaturer le syndicalisme, de lui dénier sa capacité à représenter les salariés. C’est vrai que c’est tellement plus pratique pour le patronat ou pour le pouvoir, de ne pas avoir face à soi de force organisée. Nous croyons, nous, à l’organisation, à la force collective que représentent les syndicats. Et croire à l’organisation, ce n’est pas penser qu’il ne faudrait rien changer dans nos fonctionnements et ne rien entendre des critiques et des faiblesses qui se sont faites jour. C’est au contraire penser que notre responsabilité est de rénover le syndicalisme, pour le rendre plus efficace car il est une force irremplaçable. Nous serons confrontés, pour ce qui concerne la FSU, à un enjeu d’ampleur considérable avec la mise en œuvre de la loi TFP qui supprime les compétences des commissions paritaires que les élus FSU ont investi comme des lieux privilégiés d’une défense individuelle et collective des collègues, cela peut à juste titre nous faire craindre une baisse de la syndicalisation, et c’est sans aucun doute possible un des objectifs recherchés par le gouvernement. Là encore, nous devons donc réinventer les formes de cette défense après une attaque inédite contre les droits des agents : continuons à dénoncer les droits perdus des agents pour revendiquer leur rétablissement, mais sans laisser croire que sans ces droits alors plus rien ne serait possible dès aujourd’hui : oui nous allons continuer à défendre les agents et à allier défense individuelle et intérêt général, comme nous avons toujours su le faire, ce sera difficile car l’attaque est brutale, mais nous allons nous mettre en ordre de bataille pour cela, et rien ne résiste à l’intelligence collective que nous pouvons mettre en œuvre si nous nous en donnons les moyens. Oui, bien sûr, certains ont voulu corneriser les syndicats voire les faire disparaitre… Mais que ce soit sur la question des retraites aujourd’hui, sur notre capacité à mobiliser sur le long terme, sur notre capacité à conquérir et reconquérir des droits en particulier dans la fonction publique, nous sommes devant une ardente nécessité : celle de déjouer cette stratégie mortifère, mortifère non pas seulement pour nous, la FSU et les syndicats, mais mortifère aussi pour le pays car le syndicalisme est porteur d’intérêt général, il est utile.
Enfin, au-delà de la réaffirmation de l’utilité du syndicalisme, nous devons aussi profiter du mouvement interprofessionnel dans lequel la FSU prend toute sa place pour approfondir le travail commun avec les autres organisations syndicales, c’est l’intérêt de chacun de développer le travail en commun et d’avancer sur les voies d’une unification du syndicalisme, en particulier avec la CGT et Solidaires mais sans exclusive comme nous l’avons réaffirmé dans le thème 4, pour trouver les voies de l’efficacité, sans brusquer quoi que ce soit et sans perdre de vue aucun des fondements de la FSU, mais avec la volonté de dépasser les clivages existants au bénéfice de toutes et tous les salarié-es. Oui, sur cette question, c’est la dynamique qui peut être porteuse, avancer sur cette voie peut aussi être porteur d’espoir pour tous les salariés.
Et en effet, c’est par là que je veux continuer cette intervention après avoir tracé ces quelques perspectives pour l’interne, la période appelle une poursuite de la mobilisation.
Je disais au début que j’étais à la fois impressionné et motivé. J’ai une grande confiance dans notre organisation quand je mesure tout ce que nous avons été capables de faire en termes de mobilisation ces derniers jours, la FSU a largement impulsé la dynamique dans les secteurs où elle est en responsabilité, et la mobilisation continue. Après ces 5 jours de congrès, nous avons réaffirmé avec force que nous ne laisserons pas passer la destruction annoncée de notre système solidaire de retraite, nous continuerons à mettre nos forces dans cette bataille d’ampleur car elle est au cœur du modèle social que nous défendons, nous venons de le réaffirmer dans nos mandats de congrès, la retraite, c’est un droit, c’est le droit à la vie après la vie active, pas la survie parce qu’on serait trop usé par le travail, pas une allocation minimale mais bien un revenu de remplacement, à la même hauteur que les meilleurs salaires, c’est en tous cas cela que le mouvement social a conquis et il n’entend pas s’en laisser déposséder. C’est un droit qui doit être amélioré, en particulier pour les femmes qui subissent aujourd’hui déjà de plein fouet les inégalités à la retraite comme elles les subissent dans le monde du travail : le système proposé par le gouvernement ne ferait qu’amplifier ces inégalités, à l’inverse des déclarations du gouvernement. Au-delà de la question des retraites qui cristallise les choses aujourd’hui, les salariés et retraités mobilisés posent en fait la question de leurs droits sociaux, de la reconnaissance de leur travail, … et cela nous devons continuer à l’exprimer dans le cadre du rapport de force important que nous avons su créer, la bataille est loin d’être finie et je suis convaincu que nous sommes en train de la gagner.
Plus globalement, la feuille de route telle qu’elle est tracée par le congrès de Clermont Ferrand est claire et ambitieuse, nous avons maintenant la responsabilité collective de faire vivre nos mandats, et là encore je le redis, je suis confiant car tout nous indique que le projet de libéralisation et d’individualisation de la société non seulement est rejeté par la population, mais en plus ne fonctionne pas. Et je crois que c’est précisément là-dessus que nous devons nous appuyer pour mener les batailles futures et pour nous redonner du courage, c’est en tous cas là-dessus que, je pense, il faut insister dans toutes nos actions syndicales : non, la population ne veut pas d’une école sans moyens de fonctionner et inégalitaire, d’hôpitaux débordés, de services municipaux, départementaux et régionaux mis dans l’incapacité de fonctionner quand ils ne sont pas transférés au privé, d’un État qui se désengage, de services publics exsangues, de fonctionnaires dont on nie les métiers et qui n’auraient plus comme objectif que celui de correspondre à des indicateurs de performance définis de manière bureaucratique. Non, la population ne veut pas de ce système éducatif de la sélection qui fabrique une société qui perpétue les inégalités. La population, au contraire, veut pouvoir s’adresser à des fonctionnaires compétents, intègres, et qui rendront un service public d’autant plus efficace qu’on leur accordera de la reconnaissance. C’est pour cela que nous devrons en particulier continuer la bataille contre les effets de la mise en œuvre de la loi dite de transformation de la fonction publique. Le gouvernement a instrumentalisé la question de l’efficacité des services publics, à nous de la reprendre pour faire la démonstration qu’on n’aura pas de bons services publics si on ne donne pas des droits et de la reconnaissance à ses agents, et que ces droits et cette reconnaissance sont même la condition de l’adaptation nécessaire des services publics.
Je voudrais donc finir cette intervention reprendre quelques éléments saillants de ce qui a été débattu lors de ces 5 derniers jours de congrès. Je crois en effet que le moment où nous sommes est peut-être un point de basculement où le gouvernement, après le dédain manifesté depuis son entrée en fonction, se dit prêt au dialogue, nous devons le prendre au mot et rappeler nos exigences.
Nous sommes au mitan d’un quinquennat qui a vu déferler un train de mesures de libéralisation, d’austérité et de réduction des libertés publiques, mettant à mal la cohésion sociale du pays… Les inégalités se creusent, la pauvreté augmente, pendant que les patrons du CAC 40 ont vu leurs rémunérations augmenter de 12% et qu’ils bénéficient en outre de l’exonération de l’ISF et de la flat tax.
La FSU ne se résoudra pas à cette marche forcée vers une société organisant la compétition de tous contre tous, dure aux plus faibles, facile aux plus riches, inégalitaire et destructrice de l’environnement.
La FSU considère qu’il est urgent de réorienter les politiques suivies autour au moins de 4 axes majeurs
1° axe, se battre pour le système solidaire dans le cadre de la Sécurité sociale, « Cotiser selon ses moyens, recevoir selon ses besoins » : ces mots résument les fondements de la Sécurité Sociale, qui a pour vocation de protéger l’ensemble de la population contre l’intégralité des risques sociaux. C’est aussi en défense de ce modèle solidaire qu’il faut aussi améliorer le système actuel de retraites pour garantir un bon niveau de pension à toutes et tous et l’accès à des droits nouveaux, j’en ai déjà parlé.
– 2° axe : revenir sur les dispositions de la loi de transformation de la fonction publique qui détruit non seulement les droits des agent-es mais aussi le bon fonctionnement des services publics. Il s’agit de rétablir et affirmer le rôle des commissions administratives paritaires et des CHSCT, mettre en œuvre un plan de titularisation et assurer le recrutement par concours de personnels titulaires sur les emplois permanents du service public, faire respecter et améliorer les droits des non titulaires, abandonner pour tous la gestion « néo managériale » à la prétendue « performance », et à l’inverse redonner confiance aux agent-es en reconnaissant leur engagement pour leur donner les moyens d’exercer, dans de bonnes conditions, leurs métiers et leurs missions, y compris en leur donnant une capacité plus grande à s’adapter aux évolutions nécessaires.
Les plus de 5 millions d’agent-es de la Fonction publique doivent être revalorisé-es, sans plus attendre.
Santé, Éducation, Justice, Sécurité, Culture, transport…pour répondre aux besoins de la population, lutter contre les inégalités et assurer une meilleure cohésion sociale, il est urgent de développer des services publics de qualité sur l’ensemble du territoire
3° axe, la FSU se prononce pour un vaste plan d’investissement dans la jeunesse qui permette résorber les fractures sociales qui la fragilisent et d’investir dans son éducation pour élever le niveau de sa qualification. Il n’est pas acceptable que le service public d’éducation soit volontairement mis en danger faute des moyens suffisants pour fonctionner
Enfin 4° axe, agir vraiment pour une transition écologique solidaire. Transport, logement, industrie… il faut transformer les modèles de production et consommation. Pour relever le défi, il faut s’appuyer aussi sur l’expertise et la mobilisation des acteurs publics : chercheurs, agent-es du ministère de l’environnement, de l’agriculture, de l’éducation, des collectivités territoriales, etc. L’État et des services publics confortés ont un rôle important à jouer pour contribuer à apporter les réponses nécessaires et agir dans le sens de l’intérêt général.
Nous avons de belles batailles, en positif, devant nous. Elles peuvent rassembler largement, être un moyen essentiel pour redonner envie à nombre de salarié-es, retraité-es et jeunes de venir nous rejoindre pour parler d’avenir, construire des propositions et des actions, et élever le rapport de force : Éducation, formation emploi, environnement, culture
Nous sortons de Clermont-Ferrand convaincus que de nouveaux droits sont à conquérir et oui, nous sommes fins prêts pour proposer, débattre, agir. Pour tous ces combats, nous aurons besoin les uns des autres, en tous cas moi j’aurai besoin de vous toutes et tous, je nous souhaite une dernière fois des batailles victorieuses pour les personnels et pour faire avancer nos propositions, bon retour à toutes et tous et à très bientôt dans l’action.
Merci à la SD 63
Un grand merci l’équipe nationale
– Composée de salariées : Corinne, Delphine, Marilyne,
– De militants et de militantes : Alain, Arnaud, Cédric, David, Didier, Eliane, les deux Jacques, Jean-Marie, Julien, Laurent, Magali, Philippe.
– Mention spéciale à Laura
– Mais aussi de prestataires : Jérôme, Charles Dankar et tout son équipe
Tous les personnels du palais des congrès, notamment Marine, Yannick et Sébastien qui ont ont fait pour nous faciliter la vie.
Je n’oublie pas l’équipe de restauration, nous leur redirons de vive voix tout à l’heure.
Benoît TESTE, secrétaire général de la FSU