Comité Technique Central de la PJJ du 8 juillet 2019

Déclaration préliminaire

Nous ne siégerons pas plus au second tour qu’au premier !

Madame la directrice de la PJJ, nous ne vous laisserons pas affirmer et comme le dit aussi la ministre de la justice qu’il y a eu un dialogue social sur la réforme de la justice des enfants au sein de la PJJ par la simple tenue d’un CTC, organisé comme faire-valoir, dans un délai contraint, pour lequel tout est joué d’avance : avec un texte présenté pour information, projet déjà déposé pour avis devant le Conseil d’État…

Il est inadmissible qu’un sujet aussi essentiel, qui est l’essence même de nos missions nous soit imposé sans aucune discussion sérieuse préalable.

Vous portez une très lourde responsabilité en défendant un projet gouvernemental aussi conséquent dans un délai aussi précipité. Vous pensez vous passer de l’avis des représentant.e.s des personnels, alors que vous êtes en train de bouleverser les pratiques, notamment en recentrant encore davantage le travail au pénal et en achevant de transformer les professionnel.le.s de la PJJ en agents de probation.

En instituant une mesure unique, qui n’a d’« éducatif » que le nom, de courte durée (9 mois maximum) sous forme de mise à l’épreuve, en y incluant des modules dénués de sens (MEAJ), des mesures de sûreté telles des obligations, interdictions et confiscations et en optant pour la possibilité d’y adjoindre un contrôle judiciaire, il est surtout demandé aux équipes éducatives d’être dans le contrôle et à l’enfant de rentrer rapidement dans le cadre qu’il lui est fixé sous la menace d’un jugement centré sur son comportement bien plus que sur sa problématique individuelle et familiale.

Nous sommes engagé.e.s dans des métiers d’éducation en faveur de la jeunesse la plus en difficulté et attaché.e.s à un certain nombre de grands principes, dont celui de la primauté de l’éducatif sur le répressif et celui de la spécialisation de la justice des enfants. Pour nous, un enfant délinquant est avant tout un enfant en danger. Il faut du temps pour comprendre avec lui et sa famille ce qui s’est joué dans ce passage à l’acte, pour tisser une relation éducative dans laquelle il comprenne que nous sommes là pour l’aider, l’accompagner, le protéger. Il faut du temps pour responsabiliser un.e adolescent.e en construction, pour qu’il ou elle comprenne l’importance du cadre qu’on lui fixe, qu’il ou elle prenne ou reprenne confiance en lui ou elle et trouve sa place dans la société.

Or la réforme gouvernementale que vous nous imposez aujourd’hui ne va absolument pas dans ce sens, bien au contraire. Elle bafoue le temps de la relation éducative par des délais irréalistes. Ce temps est encore diminué à chaque nouveau passage à l’acte, puisque la date de jugement sur la sanction est celle retenue lors du premier jugement sur la culpabilité. Cette date peut même être avancée dans le temps, alors même qu’il faudrait au contraire la reculer, au regard de la complexité de la situation d’un.e adolescent.e qui est dans la réitération des passages à l’acte.

Cette réforme ne remet donc pas en question les dérives répressives et sécuritaires de ces dernières années qui sont responsables de l’augmentation et la banalisation du recours à l’enfermement des enfants.

Les faibles avancées sont minorées. Il en est ainsi de la fixation du seuil de responsabilité pénale qui n’est posé qu’en présomption simple et qui peut être écarté si un.e juge estime l’enfant de moins de 13 ans capable de discernement. Cette notion non définie juridiquement laisse place à toute libre interprétation et n’évitera donc pas les écueils dénoncés par le défenseur des droits pour des enfants de 7 à 13 ans pouvant faire l’objet de mesures pénales. D’ailleurs, le régime de la retenue pour les 10/13 ans est maintenu, ce qui contribue à amoindrir la portée de la fixation de ce seuil. D’une façon générale, il y a une réelle divergence de point de vue à considérer un.e adolescent.e entièrement responsable de ses actes plutôt que d’admettre que ce sont aux adultes de le responsabiliser progressivement et que l’adolescence est une période de l’existence de construction et d’apprentissage.

Si la césure du procès est présentée comme modalité de principe, le rôle du Parquet reste prégnant dans la saisine et le recours aux procédures rapides,

le déferrement n’est ni supprimé, ni limité.

La procédure équivalente à la présentation immédiate actuelle, malgré son inefficacité avérée, est réaffirmée pour les 16/18 et dangereusement étendue aux 13/15.

Au prétexte de vouloir diminuer la détention provisoire, la mesure de CJ ainsi que le placement des 13/15 ans, y compris en centre fermé, sont banalisés. Il est, par ailleurs, envisagé que le TIG, qui est une peine, puisse être prononcé en cabinet.

Si nous avons eu l’occasion de vous dire que nous ne sommes pas opposé.e.s à la réforme de l’ordonnance du 2 février 1945, nous réaffirmons notre totale opposition à un code uniquement rédigé sur un versant pénal. Nous défendons une toute autre réforme, plus ambitieuse, pour une justice des enfants protectrice et émancipatrice et incluant la protection de l’enfance.

Tant la méthode que le fond de cette réforme révèlent une réelle méconnaissance ou un mépris des missions et des conditions de travail des professionnel.le.s de la justice des enfants ainsi que du public qu’ils et elles accompagnent au quotidien.

Ceci s’inscrit dans une logique plus globale d’une conception inique du dialogue social. Pour preuve ce CTC où les 3/4 des sujets sont présentés pour information.

Quant au seul sujet présenté pour avis, la circulaire RIFSEEP, il n’a rien a envié aux autres. Depuis l’annonce de la mise en place de ce nouveau régime indemnitaire au ministère de la Justice, le SNPES-PJJ/FSU n’a cessé de dénoncer avec cohérence et constance ce dispositif qui crée des inégalités, une hyper individualisation de la carrière des agents et consacre la part du mérite dans le traitement salarial.

Ne tenant pas compte, une fois de plus, de l’opposition de l’ensemble des organisations syndicales, le ministère est passé en force pour imposer ce régime indemnitaire aux personnels.

A la PJJ, l’affaire tourne a la Bérézina après que vous ayez repoussé l’examen de la circulaire d’application du RIFSEEP pour les corps spécifiques par deux fois, lors des CTC du 30 janvier puis des 24/25 avril 2019, au prétexte de l’absence de signature du ministère des finances. Qu’il soit voté ou non ce jour, cette situation démontre bien qu’il est impossible d’aménager l’application du RIFSEEP en minimisant l’impact défavorable qu’il aura sur la rémunération de tous les personnels. En dépit de votre surdité à écouter nos propositions, nous continuerons de dénoncer ce système qui multiplie les groupes et n’aborde à aucun moment la revalorisation des primes et indemnités pour service fait (prime de nuit, etc,…).

La DPJJ par son entêtement idéologique libéral prend la responsabilité de mettre en place un dispositif qui va diviser les personnels et faire exploser les collectifs de travail au sein des services de la PJJ !

Pour toutes ces raisons, nous avons décidé de ne pas perdre notre temps à siéger à ce nouveau CTC.

Lire la déclaration pré liminaire…http://snpespjj.fsu.fr/wp-content/spip/snpespjj/IMG/pdf/decl…