Déclaration pré liminaire au CTC du 6 avril 2018

Mme la présidente, vous convoquez aujourd’hui un CTC alors que de nombreux mouvements sociaux secouent le pays. Cheminot.e.s en grève et étudiant.e.s mobilisé.e.s manifestent dans des cortèges communs, les salarié.e.s d’Air France bloquent les aéroports, les employé.e.s d’une grande surface luttent contre la suppression de leurs emplois, les éboueurs réclament la reconnaissance de la pénibilité de leur travail : toutes et tous luttent contre la politique d’austérité du gouvernement et une stratégie de réforme à marche forcée, sans considération et prise en compte des revendications et des aspirations de la population.

Ce contexte social se retrouve au ministère de la justice, « les chantiers » et la loi de

programmation de la justice 2018-2022 sont symptomatiques d’une justice au rabais et de la remise en cause du service public pour tous et toutes. Magistrat.e.s, avocat.e.s et personnels de la Justice dont nous sommes, organisent des journées « Justice morte » devant les tribunaux.

Le SNPES-PJJ/FSU s’associe au mouvement qui englobe les services judiciaires. L’ensemble des personnels se mobilise contre la mise à distance des justiciables par l’ubérisation des procédures.

La délégation du SNPES-PJJ/FSU n’a pas siégé à ce CTC convoqué une première fois le 27 mars. Programmé dans l’urgence et avec la création de 20 centres fermés supplémentaires pour ordre du jour, il n’était qu’un simulacre de dialogue social sans lien avec la réalité des terrains. Des sujets comme le cahier des charges des UEAJ , la doctrine d’emploi des ASS ou la note séjours et camps sont reportés à plus tard,

cela n’est visiblement pas une priorité.

Depuis la création des CEF et des EPM il y plus de 15 ans, le SNPES-PJJ/FSU dénonce cette politique d’enfermement des mineur.e.s et la remise en cause de la primauté de l’éducatif.

En lien avec l’augmentation importante de l’incarcération des mineur.e.s et le projet du gouvernement de créer 20 nouveaux centres fermés, plusieurs organismes institutionnels ont produit ces derniers mois des rapports sur cette question : la justice des mineur.e.s est de plus en plus répressive et montre son inefficacité en terme d’alternative à l’incarcération. Le transfert des moyens dédiés à

l’enfermement vers les lieux éducatifs doit-être maintenant une priorité.

La Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) a été saisie par la Garde des Sceaux en novembre dernier afin de rendre un avis sur la privation de liberté des mineur.e.s. Le constat est clair : la délinquance des mineur.e.s n’augmente pas mais le nombre de mineur.e.s privé.e.s de liberté explose car la politique pénale est de plus en plus répressive. Depuis 2016, deux fois plus

d’adolescent.e.s sont détenu.e.s, placé.e.s en CEF ou en centre de rétention administrative, la durée moyenne d’enfermement s’allonge sans cesse, les mesures de probation deviennent la règle et le nombre de CJ est en forte augmentation. Dans ce marasme, la PJJ persiste à créer de nouveaux CEF qualifiés dans

cet avis « d’antichambres de la détention ».

Dans son rapport d’activité 2017, la contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) note les conséquences désastreuses de la surpopulation carcérale. Dans le cadre de « procédures de désencombrements », logique inhérente à l’administration pénitentiaire, des mineur.e.s sont transféré.e.s sans tenir compte de la spécificité de leur prise en charge liée à leur âge, une remise en cause inacceptable des liens familiaux et du droit des enfants. Ce rapport préconise la nécessité « de reprise en main des CEF par la DPJJ », avec des contrôles fréquents effectués sur le fonctionnement de ces structures et sur la prise en charge des jeunes.

Cet état des lieux est complété par l’avis des rapporteur.e.s du sénat sur le budget de la PJJ pour la loi de finance 2018. Il y est souligné l’incohérence entre les orientations de la DPJJ prônant l’individualisation de la prise en charge et « la baisse régulière et continue des crédits alloués aux autres hébergements » hors CEF. Les chiffres sont parlants : le nombre de places disponibles entre 2007 et 2012 a augmenté de 71% pour les CEF et baissé de 19% pour les UEHC. « Le développement des CEF s’est fait en grande partie au détriment des autres types de prise en charge » : CQFD.

La PJJ s’enferre dans une politique répressive qui trahit l’histoire même de l’institution. L’annonce de la création de 20 Centre Fermés supplémentaires est un abandon des valeurs éducatives qui fondent l’action de la PJJ. Contre l’avis de tous les spécialistes de l’enfance en grande difficulté et des personnels de terrain, vous prenez madame la Présidente du CTC, la responsabilité de laisser l’action éducative sur le bas-coté : la PJJ comptera plus de Centres Fermés que d’UEHC.

Pour toutes ces raisons, nous ne siégerons pas à ce CTC.

Lire la déclaration….http://snpespjj.fsu.fr/wp-content/spip/snpespjj/IMG/pdf/decl…