Déclaration préliminaire au Comité Technique Central de la PJJ du mardi 3 décembre 2019

Le Comité Technique Central de ce jour porte sur le bilan social de 2018, seul point présenté et ce pour information.Si ce document est souvent bien précieux en terme d’analyse pour les organisations syndicales, il paraît aujourd’hui plus que jamais complètement décalé et déconnecté de la réalité et ce, à deux jours d’un mouvement de grève d’ampleur.Au travers de cette déclaration préliminaire, le SNPESPJJ/FSU compte dresser « le bilan social » à la fois de ce gouvernement, du ministère de la justice mais aussi de la DPJJ….Il n’est pas très flatteur !

Depuis son arrivée au pouvoir, le président Macron et son gouvernement mènent une politique de destruction des principes de solidarité issus du Conseil National de la Résistance en 1945. Ce faisant, il s’attaque aux conquêtes sociales, toujours au détriment des plus défavorisé.e.s. Les changements des modalités d’attribution des APL ou des droits au chômage en sont les exemples les plus récents !

Il en est également de même, s’agissant du projet de réforme des retraites. Une fois de plus, les populations les plus vulnérables sont touchées et menacées par cette atteinte au principe de solidarité intergénérationnelle et par un calcul des retraites basé sur la capitalisation individuelle. Cette politique du gouvernement fait le terreau de l’extrême droite.

Pour le SNPES-PJJ/FSU, il s’agit d’un changement profond de modèle de société particulièrement pénalisant pour les fonctionnaires. Il est, en effet, envisagé de calculer le montant de la retraite en prenant en compte l’ensemble des revenus de la carrière soit 42 ou 43 ans, au lieu des 6 derniers mois et d’autre part, l’acquisition de points cotisés individuellement. Or, la valeur du point fluctuera, rendant impossible la garantie du montant perçu. Cela entraînera pour certain.e.s une baisse pouvant aller jusqu’à 30 % des pensions.

Parallèlement, la loi dite de « transformation de la Fonction Publique » votée de manière scélérate au cours de l’été porte un coup sans précédent à la notion même de service public, notamment en démantelant tout ce qui en font ses spécificités. Entre autre, elle vient généraliser le recours à la précarité au travers du développement de l’emploi de non titulaires (toujours plus important à la PJJ, actuellement à 18%), en confiant une partie des missions du service public au privé et en assouplissant les règles permettant de supprimer des services et des postes de fonctionnaires. De plus, cette loi supprime les CAP et instaure des modalités de mutation et d’avancement issues du privé. Le Ministère de la Justice va même plus loin, en choisissant d’éliminer la référence au barème lié à l’ancienneté (à l’exception des surveillant.e.s pénitentiaires) qui représente pourtant un critère objectif garant de l’équité de traitement au sein de la Fonction Publique. Dorénavant, en l’absence de représentant.e.s syndicaux.ales des personnels, la DPJJ aura tout le loisir de « gérer » la carrière des agents dans le plus grand arbitraire et dans une opacité totale.

La loi de programmation et de réforme pour la Justice adoptée malgré l’opposition d’une grande partie des professionnel.le.s le 23 mars 2019. Elle éloigne les justiciables du service public de la Justice, et parmi elles et eux, celles et ceux les plus en difficulté, par la disparition de tribunaux d’instance, la privatisation de certaines missions. Le recours aux démarches informatisées qui participent à la fracture numérique d’une partie importante de la population (11 millions de personnes environ). Les dispositions les plus importantes sur l’organisation judiciaire devraient entrer en vigueur le 1er janvier 2020 dans une impréparation la plus totale et alors même que certains décrets d’application ne sont toujours pas parus.

Cette Loi a également été l’occasion pour la Garde des Sceaux d’obtenir l’habilitation d’abroger l’Ordonnance du 2 février 1945 et de rédiger un projet de code de la Justice pénale des mineur.e.s, présenté en conseil des ministres le 11 septembre dernier. La DPJJ a participé activement à la rédaction de ce projet de code qui est un affront à la jeunesse la plus en difficulté.

Sous couvert d’exigence “d’efficacité” et de lutte contre le soi disant “laxisme” de la justice envers les mineur.e.s, cette réforme ne fera qu’aggraver la situation des enfants et des adolescent.e.s, en maintenant les procédures rapides (dont le déferrement) et augmentant encore les mesures répressives. Alors que les chiffres de la délinquance stagnent depuis 15 ans, le nombre d’enfants enfermé.e.s reste très élevé. Ce projet de code, contrairement à la propagande ministérielle qui est faite à son sujet, est loin de réaffirmer la primauté de l’éducatif sur le répressif. Il tend à réduire, voire à dévoyer le temps éducatif et à accélérer les réponses judiciaires pour les enfants les plus en difficulté. Il s’appuie sur une vision comportementaliste de la justice qui nie les particularités inhérentes de l’âge adolescent. Il est un prolongement de la logique répressive mise en place depuis plus d’une vingtaine d’années, qui permet progressivement de rapprocher la justice des enfants de celle des adultes.

Tout en annonçant préserver les enfants les plus jeunes en instaurant un seuil de responsabilité pénale en deçà duquel il n’est pas possible de condamner pénalement un enfant , le gouvernement aménage des possibilités d’écarter ce seuil. Il maintient des procédures de retenue pour les moins de 13 ans et la possibilité de prononcer des mesures éducatives pénales pour les moins de 10 ans, il banalise le recours aux sanctions, aux peines et à l’enfermement pour les 13-15 ans.

Pour accomplir ses missions éducatives, la justice des enfants a surtout besoin de moyens dévolus aux tribunaux, à la prévention et à la protection de l’enfance dans son ensemble, aux services de milieux ouverts, d’insertion et d’hébergement de la protection judiciaire de la jeunesse. Or depuis plusieurs années, les moyens exclusivement attribués à la construction de lieux d’enfermement (20 centres fermés) et à la création de places de prison.

Le SNPES-PJJ/FSU, avec ses partenaires, au sein du collectif Justice des Enfants, continuera à s’opposer avec force à l’adoption de ce projet par le Parlement.

C’est finalement le projet de loi de finances pour l’année 2020 qui révèle le mieux la politique gouvernementale en matière de justice avec un budget qui n’augmente que dans des proportions ridicules au regard de notre retard sur nos voisins européens. Les dites « augmentations » étant en fait réservées à l’enfermement et au fantasme du tout numérique, au détriment de l’accès au droit, de l’accompagnement social et éducatif et d’une justice de proximité en capacité de rendre des décisions de qualité dans des délais raisonnables.

En ce qui concerne la situation des personnels, les conditions de travail sont de plus en plus dégradées. La politique statutaire menée par le ministère et la DPJJ démontre le mépris affiché pour les missions et les personnels qui les exercent. Les exemples sont nombreux :

Les adjoint.e.s administratif.ve.s sont toujours en attente de la requalification de leur poste en catégorie B. Les ad-joint.e.s techniques sont toujours cantonné.e.s en catégorie C sans espoir de promotion sociale.

Le sort des Professeur.e.s techniques vacille entre une disparition programmée et un rattachement hypothétique à l’Éducation Nationale, il est constamment reporté aux calendes grecques, sans parler du PPCR, de la tenue des CAP d’avancement et de la reprise du recrutement.

Les psychologues sont toujours sous la menace d’une perte d’identité professionnelle au travers du statut ministériel. Les éducateur.trice.s et assistant.e.s de service social se désolent d’un A minuscule, tandis que les CSE sont amenés à disparaître.

Les RUES viennent de se voir imposé un petit A, avec un statut de cadre éducatif passé au forceps et au rabais au mépris de leur mission et pour certain.e.s de leur implication sur leur poste depuis plusieurs années.

Ne parlons pas de l’organisation calamiteuse de l’examen professionnel d’éducateur.trice.s 1ère classe et du concours ASS.

A ce mécontentement l’administration pense répondre par la mise en place du Complément Indemnitaire Annuel (CIA) véritable « prime au mérite » qui vient encore plus détruire les collectifs de travail, mettre les agents en concurrence et renforcer les pouvoirs arbitraires de l’Administration.

Au final c’est un véritable pamphlet tant pour les personnels que pour les jeunes et les familles que nous accompagnons au quotidien. En terme de dialogue social c’est véritable une infamie !

En réponse à votre bilan social catastrophique, le SNPES-PJJ/FSU exige :

• le maintien d’un régime de retraite par répartition qui s’appuie sur la solidarité intergénérationnelle et reconnaît la pénibilité des missions exercées au sein de la PJJ

• Le dégel du point d’indice et l’ouverture de négociations salariales pour l’ensemble des corps

• L’intégration des primes réparties de façon équitable à l’ensemble des personnels dans le salaire

•L’abrogation de la loi dite de transformation de la fonction publique et le maintien des CAP.

•L’abrogation de la loi de programmation et de réforme pour la Justice

•La réouverture des chantiers statutaires permettant la reconnaissance et la valorisation des missions exercées par l’ensemble des personnels de la PJJ

• L’abandon du projet de code de justice pénale des mineur.e.s et une réforme ambitieuse de l’ordonnance de 1945 expurgée des mesures sécuritaires qui s’y sont empilées.

• le redéploiement des moyens actuellement dévolus aux lieux d’enfermement vers les services de milieu ouvert, d’insertion et d’hébergement.

Nous attendons du gouvernement, du Ministère de la Justice et de notre administration la DPJJ qu’ils entendent la colère et les revendications qui s’exprimeront dans la rue le 5 décembre et qu’ils infléchissent radicalement leur politique, en faveur tant des personnels et par conséquent des jeunes et des familles qu’ils et elles accompagnent au quotidien !

Dans ce contexte ne comptez par sur nous pour aborder un bilan social que nous jugeons déplorable, ni pour siéger à ce CTC. Comme l’ensemble des citoyen.ne.s de ce pays, comme les générations qui nous succèdent, qu’ils ou elles aient à faire à la PJJ ou non, comme les personnels de la PJJ, vous êtes vous aussi concerné.e.s par ces attaques sans précédent de ces réformes. C’est pourquoi nous vous invitons à réfléchir à la gravité de ces enjeux de société et à prendre vos responsabilités.

Lire la déclaration préliminaire….http://snpespjj.fsu.fr/wp-content/spip/snpespjj/IMG/pdf/decl…