Depuis le 17 novembre 2018, l’actualité politique est traversée par le mouvement des gilets jaunes, percutant nos débats syndicaux. La présence manifeste des courants d’extrême droite et de la facho-sphère aussi bien sur les réseaux sociaux que sur les ronds-points et leur participation active dans la construction de ce mouvement ont imposé au départ de la circonspection, si ce n’est de la méfiance ou du rejet.

Le mouvement s’est installé dans le temps, de façon inédite et protéiforme. A certains endroits, l’extrême droite reste fortement enracinée, soit par la présence de personnalités ou groupuscules clairement identifiés, soit au contraire, par des personnes se dissimulant derrière les gilets jaunes pour y diffuser de façon plus ou moins insidieuse leurs idées racistes, sexistes, homophobes…

Parallèlement, il y a surtout des citoyen.ne.s (salarié.e.s précaires, chômeurs et chômeuses, retraité.e.s…), pour beaucoup issu.e.s des milieux ruraux ou des périphéries des grandes villes, qui expriment un ras le bol réel, une colère face à l’injustice sociale et fiscale et pour qui la hausse du tarif du gazole a été l’épisode de trop. Les femmes, principales victimes de la précarité, se montrent aussi visibles et actives sur certains territoires.

Une grande partie de ce mouvement exprime clairement de la méfiance, voire de la défiance vis à vis des politiques et des syndicats. Si, peu à peu, des partis de gauches, des associations, des organisations militantes locales et des syndicalistes ont manifesté ostensiblement leur soutien à ce mouvement et ont appelé à rejoindre les mobilisations des gilets jaunes, de leur côté, les organisations syndicales nationales dans leur ensemble, se sont montrées beaucoup plus réservées à s’exprimer sur le mouvement en cours, y compris lors de l’appel à mobilisation du 14 décembre dernier. Alors même que, progressivement, des mots d’ordre pouvaient converger avec nos revendications, à savoir : la hausse des salaires, des pensions, des retraites, la justice fiscale avec notamment le rétablissement de l’ISF, la justice sociale, et le rétablissement des services publics.

Les gilets jaunes obtiennent un premier recul du gouvernement, avec la suspension temporaire puis prolongée de la hausse du prix de l’essence. Par la suite, Macron, en échange d’un appel au calme, annonce une série de mesurettes qui ne leurre personne.

Parallèlement, durant plus de 3 semaines, les lycéens et lycéennes se sont mobilisé.e.s contre le projet Parcoursup. Cette mobilisation a concerné le blocage de plus de 450 lycées dans toute la France, traduisant ainsi le mal être d’une jeunesse inquiète pour son devenir face à un dispositif qui poursuit une logique de sélection universitaire et entérine une scolarité à plusieurs vitesses.

Face à ce contexte social, le gouvernement répond surtout par une utilisation disproportionnée et illégitime de la force tant à l’encontre des gilets jaunes que de la jeunesse. Il a voulu de façon manifeste casser ces mouvements par une répression policière d’une violence inouïe et intolérable (recours aux flash balls, grenades de désencerclement, véhicules blindés…), qui humilie, blesse, mutile gravement des manifestant.e.s. Loin de relayer ces violences, de grands médias instrumentalisent certaines formes de radicalisation des mouvements pour rendre impopulaires ces derniers. En réponse, le 1er ministre répond par de nouvelles dispositions répressives, notamment l’instauration d’un ficher de casseurs qui viendraient encore gravement entraver le droit de manifester.

Le SNPES-PJJ/FSU a dénoncé la répression et la judiciarisation excessives à l’encontre de la jeunesse au travers notamment de communiqués de presse, d’une conférence de presse et d’une adresse à la DPJJ.

Les migrant.e.s, pour leur part, ne sont plus à la une de l’actualité. Pourtant, ils et elles continuent de subir maltraitances, discriminations et répression, dont parmi elles et eux les mineur.e.s et jeune.s majeur.e.s isolé.e.s et étranger.ère.s. Le 18 décembre avait lieu des manifestations pour la journée internationale des migrant.e.s. Malgré des rassemblements organisés dans plus de 50 villes partout en France, aucun média n’a relayé ce succès. Le collectif du 18 décembre à l’origine de ce mouvement, dont le SNPES-PJJ/FSU fait partie, entend pouvoir organiser d’autres initiatives pour dénoncer la situation et faire infléchir les politiques migratoires.

Dans nombre de pays occidentaux, la question migratoire et la figure du migrant sont instrumentalisées par les partis d’extrême droite. Ces partis réussissent parfois à s’allier à des partis populistes ou traditionnels souhaitant accéder au pouvoir ou y rester. De leur côté, les gouvernements en place, de part leur politique libérale, favorisent leur émergence et cautionnent la montée des idées parfois ouvertement racistes, xénophobes, sexistes et homophobes. Face à cela, il y a la nécessité impérative de construire une alternative politique humaniste et progressiste.

Le 24 novembre 2018, 80 000 personnes ont défilé dans toute la France pour en finir avec toutes les violences sexistes et sexuelles faites aux femmes. Un an après la vague #MeToo, la mobilisation a été d’ampleur, mais les réponses gouvernementales restent largement insuffisantes. Il s’agit dès à présent de favoriser les convergences des organisations féministes et des femmes impliquées dans le mouvement des gilets jaunes, notamment pour construire la journée du 8 mars autour de la reconnaissance de la valeur du travail des femmes souvent rendu invisible.

La fin d’année a aussi été marquée par les élections professionnelles. Si la CGT reste en tête dans la Fonction Publique, de façon inédite et peu réjouissante, la CFDT devient premier syndicat public/privé confondu, dans un contexte de baisse de participation et de perte de voix de l’ensemble des organisations syndicales. FO maintient, quant à elle, sa place de premier syndicat au sein de la fonction publique d’État. La FSU y garde sa deuxième place.

Au Ministère de la Justice, la FSU garde son siège, dont le poste de titulaire au CTM est tenu par le SNPES-PJJ/FSU, ce qui nous permet de porter directement les préoccupations et les revendications des personnels de la PJJ dans cette instance.

A la PJJ, le SNPES-PJJ/FSU conserve 5 sièges sur 10 au Comité Technique Central et est représenté dans l’ensemble des Comités Techniques Régionaux et Territoriaux,

Si le SNPES-PJJ/FSU reste la première organisation syndicale représentative des personnels à la PJJ, le nombre de voix continue de diminuer. Il faut noter, par ailleurs, une dilution des voix liée à la multiplication des organisations syndicales en lice, dont certaines peuvent avoir bénéficié de la prime à la nouveauté.

Par ailleurs, comme nous le pressentions, FO PJJ a fait une entrée inquiétante sur des positions contraires à nos valeurs, principalement dans la région Grand Nord et dans certains territoires comme la Seine-Saint-Denis.

Ces constats nécessitent que nous puissions approfondir nos échanges et notre analyse sur ces résultats d’ici le Congrès afin de donner un nouvel élan à notre vie syndicale.

Le gouvernement persiste et maintient le gel du point d’indice des fonctionnaires, contribuant à creuser l’écart entre leur salaire et l’inflation et il refuse d’entendre les revendications des représentant.e.s du personnel. Dans un même temps, il affirme ses priorités et sa politique sécuritaire en accordant primes et augmentations aux policiers.

Du côté du Ministère de la Justice, à la veille de cette CAN, le 15 janvier 2019, nous avons participé, en appelant à la grève, à la manifestation nationale intersyndicale organisée à Paris, contre le projet de Loi de Programmation Justice 2018-2022. Malgré une mobilisation importante, la Garde des Sceaux continue de faire la sourde oreille face au mécontentement exprimé par les professionnel.le.s qui exigent le retrait pur et simple de ce projet.

Outre les stigmates de la déshumanisation du service public de la justice et l’iniquité de traitements des justiciables, ce projet prévoit aussi des dispositions qui menacent particulièrement les missions de la PJJ. En effet, en plus du volet financier concernant la création des 20 centres fermés supplémentaires, il contient un amendement déposé in extremis, le 27 novembre dernier, par la Garde des Sceaux permettant au gouvernement de légiférer sur la justice des mineur.e.s par voix d’ordonnance, c’est à dire sans débat parlementaire. La volonté de la ministre est très claire, elle vise à la rédaction d’un code pénal des mineur.e.s, dans un délai de 6 mois, pour une justice plus « efficace » et plus « prompte » envers les victimes. Ceci laisse entendre que la justice actuelle serait lente et indulgente, ce qui est faux, puisque l’enfermement des enfants n’a jamais été aussi important. Les procédures accélérées contribuent largement à rapprocher la justice des mineur.e.s de celle des majeur.e.s.

Dès les premières annonces, le SNPES-PJJ/FSU a interpellé la Garde des Sceaux par une lettre unitaire ouverte avec un ensemble large de partenaires (SM, le SAF, l’OIP, la LDH,…). Une rencontre aura lieu le 6 février prochain. Par ailleurs, l’arc unitaire met en place une campagne offensive contre ce projet, qui débutera le 2 février, date d’anniversaire de l’ordonnance de 45 (publication d’une Tribune, déconstruction des idées reçues via les réseaux sociaux, actions, rassemblements et conférence de presse..).

Au-delà de l’amendement en lui-même, nous sentons poindre une transformation inquiétante de nos missions et de nos professions. En effet, si nous mettons bout à bout la construction des nouveaux centres fermés, le redéploiement annoncé des 196 postes, le transfert des MJIE au service habilité, les états généraux de l’hébergement, la fermeture de certains foyers, les MEAJ, l’expérimentation de la justice restaurative et les nouvelles méthodes de formation, il semblerait que les nouvelles orientations de la PJJ soient déjà bien jalonnées. Dans ces conditions, le code pénal des mineur.e.s n’apparaît que comme une simple formalité.

Le SNPES-PJJ/FSU portera au sein de la FSU la nécessité d’une convergence des mobilisations, notamment avec le mouvement des gilets jaunes en accord avec nos valeurs, afin de stopper les politiques libérales et d’instaurer un véritable rapport de force face au gouvernement.

Par ailleurs, le SNPES-PJJ/FSU avec la FSU, poursuivra la lutte pour la revalorisation salariale et statutaire des fonctionnaires.

La CAN appelle les syndiqué.e.s :

- à se mobiliser autour des initiatives de luttes féministes, dont le stage FSU du 24 janvier, la journée du 8 mars et le stage intersyndical femmes des 21 et 22 mars.

- à prendre part aux initiatives locales de soutien aux migrant.e.s.

- à s’appuyer sur le collectif JU-JIE (Justice pour les Jeunes Isolé.e.s Etranger.ère.s) pour dénoncer les discriminations et les maltraitances dont ces jeunes font l’objet. Elle invite notamment les syndiqué.e.s intéressé.e.s à participer à la réunion nationale qui se tiendra à Paris, le samedi 23 mars, notamment sur la question du fichage des jeunes et à diffuser largement l’information auprès des associations militantes.

- à se mobiliser dans les collectifs de lutte contre la facho-sphère et les invite à participer à une initiative du collectif intersyndical de lutte contre l’extrême droite qui aura lieu le 14 février à Lyon.

- à poursuivre la dénonciation de la répression, des violences policières, des atteintes aux droits et aux libertés individuelles, tout particulièrement celles qui touchent la jeunesse.

- sur le plan statutaire, à poursuivre les actions en cours, dont la diffusion de la pétition « pour que cesse le préjudice subi par l’ensemble du corps des professeur.e.s techniques », celle « pour un statut des psychologues à la PJJ garant de leur identité professionnelle », de la lettre type « pour la reconnaissance statutaire de la filière administrative et technique », et de mobilisation concernant la filière socio-éducative, après un premier recul du Secrétariat Général, aux CTM du 22 et du 28 novembre 2018.

- à continuer d’informer les professionnels sur les méfaits du projet de Loi justice 2018, dont la construction des 20 nouveaux centres fermés et la réforme de la justice des enfants par voie d’ordonnance et à les inciter à se joindre aux mobilisations portées par les intersyndicales. A ce titre, la CAN appelle tout.e.s les syndiqué.e.s à organiser et/ou à participer aux actions locales, le 2 février 2019, partout où ce sera possible (conférence de presse, rassemblement…) et à construire les suites de la campagne.

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