« Comme dans un film américain… »
Cela se passe un Vendredi 27 avril 2018 aux alentours de midi à Meythet, une commune de l’agglomération d’Annecy en Haute Savoie. Vers 11h20, malgré le premier passage « remarqué » d’une camionnette de gendarmerie dans laquelle se trouvaient des agents cagoulés, rien ne laissait présager de ce qu’il allait advenir quelques minutes plus tard. En effet, une trentaine de gendarmes (dont des agents du Groupe d’Intervention de la Gendarmerie Nationale) se camouflait alors dans les usines avoisinantes de l’UEAJ. Le quartier était bouclé ! Un seul mot d’ordre, témoigneront les voisins « Nous sommes là pour une personne qui va passer à l’acte ». Telles ont été les explications des agents en civil, en uniforme ou cagoulés qui justifiaient l’intervention en cours.
Un jeune accueilli à l’UEAJ se fait arrêter sans ménagement, dès son heure de sortie habituelle, par ces gendarmes. Une éducatrice inquiète du sort de ce dernier, dont nous avons d’ailleurs la responsabilité, constatant qu’il se faisait interpeller violemment, est repoussé verbalement de façon menaçante par un agent pour l’empêcher de s’interposer. Une autre collègue est, elle aussi, visée parce qu’elle est dehors, au téléphone, et qu’elle entre dans le périmètre d’intervention.
Non, il ne s’agissait pas d’un film !
Cette intervention pourrait sembler banale de nos jours, mais ces méthodes, ces actions demeurent très choquantes. Ce mineur est-il tellement dangereux qu’il nécessite de tels moyens ?
Il sortait d’un bilan mensuel très positif, au regard de son parcours. La relation éducative semblait bien amorcée : selon les professionnels de l’UEAJ, cet adolescent montrait une progression et l’équipe éducative percevait des changements sensibles dans son attitude. Un vrai travail éducatif était s’instaurait.
L’équipe a donc été légitimement choquée et traumatisée par ces méthodes « musclées » d’interpellations : peu importe le jeune ou les faits qui lui sont reprochés, ceci reste difficilement admissible pour des éducateurs, même lorsqu’ils interviennent à partir d’un cadre pénal. Les personnels ont eu peur pour ce jeune, ne comprenant pas ce qui se déroulait sous leurs yeux. Aucun membre de l’équipe n’avait été averti de cette interpellation et du caractère impressionnant d’un tel dispositif.
Les autres jeunes accueillis ont été témoins de la scène : s’il n’en n’ont pas été moins heurtés par l’interpellation, ce type de d’événement vient un peu plus stigmatiser le jeune en question.
Plusieurs interrogations nous traversent :
• Était il nécessaire de déployer un tel arsenal pour interpeller ce jeune ?
• Y avait il une dangerosité justifiant de venir le chercher expressément à la sortie de son lieu d’insertion et d’éducation ?
• Cela pouvait il se faire avec une méthode plus appropriée et dans d’autres lieux moins stigmatisants ?
• Quels signes sont envoyés aux professionnels qui travaillent dans les services de la PJJ, aux jeunes qui y sont accueillis et qui sont pris en charge dans ces structures ?
• Pourquoi le jeune s’est vu interpeller, avec de telles méthodes, aux abords de l’UEAJ ? Qui, détenteurs de l’information, l’a divulguée aux services de gendarmerie ?
• Les services de la PJJ sont ils des lieux où les jeunes pourraient venir dans la crainte, ce qui remettrait alors en cause la relation éducative qui s’installe ?
Nous SNPES-PJJ/ FSU dénonçons ce mode d’intervention à la sortie d’un lieu d’éducation et d’insertion, alors que ces structures ont pour mission d’accompagner, de protéger, d’éduquer.
Nous SNPES-PJJ/FSU déplorons la stigmatisation des jeunes les plus fragilisés par ces arrestations brutales.
A l’issue d’une telle interpellation, la DT du territoire des Savoie n’a nullement pris contact avec les personnels qui ont pourtant, eux aussi, subi cette violente intervention. Ils ont dû s’organiser seuls, devant composer avec cette entrave claire à leur éthique professionnelle et à leurs valeurs humaines. Ne serait ce que pour écouter, expliquer, rassurer, accompagner ; la Direction Territoriale a encore manqué aux devoirs fondamentaux qu’elle a pourtant vis à vis de ses agents.
Suite à ces événements, le SNPES-PJJ/FSU demande à être rapidement entendu par la DT des Savoie et par la DIR Centre Est.
Tout agent a droit à des explications concernant la légitimité de ce type d’action, d’autant qu’il semble qu’elle puisse advenir au sein de n’importe quel service.
Le SNPES-PJJ/FSU ne peut s’empêcher de s’interroger sur la place et la mission du Référent Laïcité du territoire, et de ses liens avec la Préfecture.
Nous ne pouvons banaliser ces interpellations faites aux alentours ou à la sortie des services d’accompagnement, d’éducation, d’insertion et d e formation.
Le SNPES-PJJ/FSU souhaite porter une véritable réflexion sur la protection :
de ces lieux,
des enfants qui y sont accueillis,
des personnels qui y travaillent,
du droit de s’instruire dans la sérénité.
Le Secrétariat de la section 7374 SNPES-PJJ/FSU
Lire le tract…http://snpespjj.fsu.fr/wp-content/spip/snpespjj/IMG/pdf/27_a…